Mercredis de la Coredem

Les défis des sociétés civiles en Afrique

Le 19 janvier 2011, plus de 90 personnes se sont réunies à la Fondation Pour le Progrès de l’Homme (FPH) pour débattre des défis des sociétés civiles en Afrique.

Cette rencontre a été organisée à l’occasion de la 11ème édition du Forum Social Mondial qui se déroule à Dakar (Sénégal) du 6 au 11 février. Ce fut l’occasion de soulever les défis que rencontrent les sociétés civiles en Afrique.

Démocratisation, redistribution des richesses, luttes pour les droits, protection de l’environnement, résolution des conflits… Les défis des sociétés civiles africaines sont nombreux. Comment s’organisent les mouvements sociaux, les ONG, les nouveaux réseaux citoyens du continent noir ? Quelles formes de mobilisation et de gouvernance proposent-ils pour l’Afrique ? Comment lancer des nouvelles initiatives pour changer les comportements et faire pression auprès des décideurs pour la construction des sociétés plus justes et égalitaires ?

Introduite par Eros Sana (éditorialiste du site d’information Basta ! membre de la Zone d’écologie populaire), il a été signaler, de prime abord, la pluralité des formes d’organisations venant de la société civile (associations, syndicats, structures communautaires, etc.). Autour de cette pluralité et par conséquent, d’objectifs divers voire divergents, le défi prééminent du continent est la démocratisation des sociétés africaines.

Il s’agit avant tout d’encourager et de participer à la démocratisation du continent en y associant les réponses pour le respect de la justice sociale et environnementale. L’accaparement des terres et le pillage des ressources naturelles sont d’autant un défi pour la souveraineté des peuples que la preuve d’une démocratisation au rabais.

Comment ces défis continentaux sont-ils relevés par les organisations civiles ? Quelles sont les stratégies d’actions empruntées face aux enjeux transnationaux des entreprises et à l’agenda des organisations internationales ?

Michel Roy (responsable plaidoyer international au Secours Catholique et coordinateur de la Plate forme française « Publiez ce que vous payez » depuis 2003 a fait part de l’expérience de la Plate forme pour relever deux réponses majeures aux défis des sociétés civiles en Afrique.

La participation des citoyens à la gouvernance locale est un dés éléments essentiels à la construction de la démocratie et à l’effectivité des actions entreprises par la société civile. Les organisations communautaires, les élus à la base, etc. ont un rôle de propositions et de mobilisations inéluctable pour répondre aux défaillances des modes de gouvernance en place.

Conjointement, le renforcement des acteurs du Sud passe par l’appartenance à des réseaux globaux et régionaux qui portent sur des champs sensibles au niveau politique, tels que l’annulation de la dette des pays pauvres, la taxe pour la justice sociale.

Assane Mbaye (Alliance pour refonder la gouvernance en Afrique et partenaire de l’Institut de recherche et débat sur la gouvernance-IRG) a souligné la difficulté des organisations de la société civile d’intégrer l’espace public. Plusieurs raisons ont été évoquées. Les actions menées par les sociétés civiles doivent faire face à des distorsions entre demande de la population et demande internationale, entre demande de la population et offre des bailleurs de fonds internationaux. Elles agissent dans un contexte de bipolarisation politique dans lequel elles doivent se positionner, le plus souvent, pro gouvernemental ou issue de l’opposition.

Les organisations de la société civile doivent participer et s’imposer dans les espaces de concertation, souvent bipartite : Etat/Entreprises, afin de construire une logique de coproduction. Le défi s’avère d’autant plus périlleux que la concertation ne doit pas entraver la formation et l’institution de contre-pouvoirs et d’une scène citoyenne critique. Parallèlement à la sphère politique, il est primordial de promouvoir un modèle endogène de gestion des ressources naturelles afin de répondre aux enjeux de développement et de justice. De fait, le modèle libéral, actuellement dominant, s’avère inconciliable avec le fonctionnement des sociétés locales.

Firoze Manji – Pambazuka. Des missionnaires aux organisations de lutte contre l’indépendance, les formes des organisations civiles ont été et sont toujours influencées par les rapports de force en jeu. Fin des années 1970, avec l’avènement des plans d’ajustements structurels en Afrique, la mise en concurrence entre les pays africains puis avec les marchés internationaux ont empêché toutes possibilités d’améliorations sociales. La libéralisation des marchés, notamment agricoles, et la privatisation des services sociaux (eau, transports, télécommunications) ont amené les organisations civiles à pallier le désengagement de l’État. Ce type de présence des organisations a développé l’assistanat, menant à la dépolitisation des problèmes politiques, économiques et sociaux ; L’enjeu des acteurs de la société civile est de démocratiser les sociétés et politiser les indigences en promouvant des initiatives innovantes. Le changement ne sera possible qu’en dessinant les nouvelles traces d’un nouveau monde possible.